Quelle technologie choisir pour son process ?

Le 24/01/2023 à 17:35 par La rédaction

Lorsqu'un produit en vrac nécessite une opération de séchage, le choix de la bonne technologie est prédominant, tant au regard du produit en lui-même qu'au regard des consommations énergétiques. Aurélien Delhay, responsable technicocommercial chez LESSINE, nous partage ici ses préconisations.

 

En quoi la notion de pragmatisme est-elle importante chez LESSINE ?

Aurélien Delhay : Notre société conçoit et installe des équipements et des installations destinés au broyage, au mélange, au séchage, au tamisage et à la manutention de produits en vrac. Le pragmatisme fait partie de l’ADN de LESSINE, dans le sens où ce ne sont pas nos clients qui s’adaptent à nos solutions, mais les solutions qui s’adaptent aux particularités de chaque client. Nous ne cherchons pas la sur-qualité ou la sous-qualité : nous développons des solutions parfaitement adaptées au client, quels que soient son besoin et la fréquence d’utilisation. Nous n’avons pas peur de sortir de nos standards et faisons preuve d’une grande flexibilité dans la conception des équipements pour proposer le meilleur compromis technico-économique.

Sur quelles technologies de séchage vous concentrez-vous ?

A. D. : Il existe sur le marché plusieurs technologies de séchage, comme les technologies statiques, plutôt adaptées pour de grands silos de stockage ou pour des étuves de séchage, ou encore les technologies à lit fluidisé, à bande, etc. Chez LESSINE, nous avons choisi de nous focaliser sur trois technologies spécifiques : le sécheur à tambour rotatif, le sécheur flash et le sécheur turbulent. Ces solutions sont historiquement liées à l’expertise de LESSINE depuis plus de 130 ans ainsi qu’aux différentes acquisitions réalisées par la société et permettant de couvrir un large panel d’applications.

Lors du Vrac Tech du Mans, LESSINE distribuera une bière aux couleurs de la société, nommée Pragmatik.

Pour quelles applications préconisez-vous l’utilisation d’un sécheur rotatif ?

A. D. : Les sécheurs rotatifs utilisent une action de relevage en combinaison avec un air de séchage afin de sécher efficacement les matériaux. Le plus souvent, les sécheurs rotatifs sont de type direct, ce qui signifie que l’air de séchage est en contact direct avec la matière. Certains sécheurs, cependant, sont du type indirect, dans lequel le séchoir est chauffé à l’extérieur, pour éviter le contact direct entre le matériau et l’air de séchage. En mode direct, l’objectif est de maximiser le temps de contact entre la matière humide et le gaz chaud en circulation à relativement faible vitesse. Le temps de séjour de la matière dans le tube sécheur se situe généralement entre 10 et 20 minutes. Historiquement, les sécheurs à contre-courant (flux croisés entre la  matière et l’air chaud) étaient plus répandus car ils offrent un dimensionnement plus réduit et un coût d’investissement plus faible. Ce type de sécheur est par contre plus énergivore qu’un type à co-courant (flux air chaud et matière dans le même sens). Pour réduire la consommation énergétique, il est préférable de maximiser l’échange entre la matière et le gaz chaud en augmentant le temps de séjour de la matière. Nous favorisons donc le sécheur co-courant, qui permet de maximiser l’échange thermique et donc de réduire l’OPEX. Le sécheur rotatif contre-courant reste une solution dans des applications extrêmes ou l’opération de séchage demande des températures du produit plus élevées (exemples : produits avec humidité captée au cœur, niveau de séchage demandé très poussé (<0.1%), etc.). Le sécheur rotatif est une technologie robuste, éprouvée, flexible et particulièrement adaptée pour le séchage de grosses granulométries ou des matières abrasives (exemples : roche calcaire, sable, argile, poudres métalliques, etc.).


Sécheur rotatif : exemples d’application

  • Séchage de minéraux (granulats, sables, argiles, etc.)
  • Séchage d’engrais chimiques
  • Séchage de poudre métalliques
  • Séchage de végétaux

Quand faudra-t-il privilégier une solution flash ?

A. D. : Le sécheur flash est un sécheur en mode direct (contact direct entre la matière et le produit) basé sur la circulation de matière humide au sein d’une colonne en contact avec du gaz chaud à haute vitesse. Le temps de séjour de la matière sur un sécheur flash se situe entre une et quelques secondes, ce qui le différencie grandement du sécheur rotatif. Ces deux technologies sont donc rarement en concurrence. Suivant l’humidité à retirer du produit, on optera pour une colonne simple ou pour une solution en boucle appelée « ring flash ». Dans le cas de cette dernière, un séparateur en bout de colonne flash va séparer le produit déjà sec de celui n’ayant pas encore atteint le taux d’humidité résiduel attendu et renvoie ce dernier à l’entrée de la colonne flash pour augmenter le temps de séjour. L’utilisation de colonnes verticales plutôt que d’une tuyauterie horizontale est préconisée pour éviter les possibles accumulations de produits dans les tuyauteries en cas d’arrêt inattendu du process, qu’il s’agisse d’une colonne simple ou d’une boucle, et donc d’éviter d’éventuelles opérations de nettoyage de la conduite. L’efficacité du sécheur flash augmente lorsque la granulométrie du produit diminue car la surface de contact (et donc de séchage) augmente. Il est donc courant d’intégrer une opération de broyage intégrée dans le sécheur flash. Différents types de broyage peuvent être proposés (de l’émotteur au broyeur rapide en passant pas broyeur à marteaux, à cage, etc.) en fonction du produit et de la granulométrie recherchée. Le séchage en mode flash et donc avec un temps de séjour très court présente aussi un avantage important pour le séchage de matières thermosensibles (organiques, plastiques, etc.) car le temps pendant lequel la matière est en contact avec de l’air chaud est très court et les réactions de dégradations ne peuvent alors avoir lieu. Pour les produits fins, peu abrasifs, une humidité facilement disponible et/ou une sensibilité à la température, nous privilégions la solution flash car elle est plus économique en termes de CAPEX et plus compacte comparée à un sécheur rotatif. Bien que plus contraignant en termes d’hauteur d’implantation que le sécheur rotatif, le sécheur flash a l’avantage de pouvoir transporter la matière directement à l’alimentation des process aval sans manutention supplémentaire. L’utilisation d’une conduite totalement fermée permet aussi d’éviter les émanations de poussières, les contaminations croisées, etc.


Sécheur flash : exemples d’application

  • Séchage de fines de minéraux
  • Séchage gâteaux filtre presse
  • Séchage de farines végétales ou animales
  • Séchage de fibres végétales

Ligne de séchage flash conçue par LESSINE.

Le sécheur turbulent est-il adapté à toutes les productions ?

A. D. : Il s’agit d’une technologie batch : une cuve est chauffée par conduction tout en maintenant la matière en agitation à l’aide d’un outil mécanique en rotation. Afin d’augmenter les performances de séchage, il est possible d’intégrer un système de pompe à vide permettant d’augmenter l’efficacité du séchage. Le sécheur turbulent est dédié au séchage de petites quantités de matières très humides : l’investissement dans un sécheur rotatif ou un sécheur flash ne serait ici pas rentable. Le sécheur turbulent aura une capacité limitée et il faut très souvent plusieurs heures pour sécher le produit. Il est donc particulièrement adapté aux produits à forte valeur ajoutée et en petite quantité en semi-production ou en laboratoire.

Pouvez-vous nous parler des énergies alternatives et de l’empreinte carbone de ligne de séchage ?

A. D. : Il est indiscutable que les opérations de séchages sont des opérations énergivores et encore souvent basées sur des énergies fossiles. L’évolution actuelle des coûts énergétiques et la volonté de diminuer l’empreinte carbone impliquent la recherche de solutions innovantes en matière de consommation énergétique pour le séchage. Tout d’abord, le type d’énergie employé doit être particulièrement  étudié. Les énergies habituellement utilisées sont le gaz naturel, le propane ou butane et le fioul (léger et lourd). Il est parfois possible de passer sur des énergies décarbonées comme les énergies renouvelables. Dans cette optique, LESSINE a réalisé une installation de valorisation de verre issu du recyclage de bouteilles afin de produire un liant alternatif pour l’industrie du ciment. La volonté du client était d’avoir une ligne complètement alimentée par son parc de panneaux solaires. LESSINE a donc étudié et livré une ligne complète, incluant une opération de séchage avec un sécheur rotatif, 100 % alimentée électriquement par les panneaux solaires. D’autres solutions, comme les chaudières biomasse, sont à l’étude, mais présentent des contraintes en termes de gestion et de coûts d’investissement qui ne les rendent possibles que sur des installation de très grosses puissances.


Zoom sur un nouveau mélangeur de containeur IBC type MIBC

LESSINE a récemment développé une solution de mélange adaptée aux containeurs IBC. Le système permet le mélange de produit directement à l'intérieur d'une cuve amovible de 1 000 à 2 500 litres. Cette solution a l'avantage de permettre le mélange de batch de recettes différentes avec le moins de nettoyage possible entre deux recettes car seule la cuve nécessite un nettoyage. Elle est donc très prisés dans l'industrie agroalimentaire (avec les problématiques de contamination croisée et d'allergène), les industries des pigments et colorants solides, poudres métalliques, etc. La cuve est placée par chariot sur la base du mélangeur et, à l'aide de vérins électriques, est pincée sur le dessus et le dessous. La cuve est alors mise en rotation suivant un axe asymétrique permettant un mélange intensif. Un agitateur haute intensité peut, au besoin, être intégré pour émotter les potentiels agglomérats et disperser les additifs à faible concentration. Une fois le mélange terminé, le système effectuera un mouvement de balancier afin de reniveler le produit à l'intérieur de la cuve. La cuve est libérée et l'opérateur pourra la déplacer. En utilisant des cuves dédiées à certains produits, l'utilisateur évitera les opérations de nettoyage poussées et les risques de contamination croisée. Différents modèles du mélangeur MIBC sont proposés suivant l'application finale (agroalimentaire, industries, etc.) avec diverses options disponibles (agitateur, automatisation, ATEX, etc.). La gamme de mélangeurs LESSINE couvre un large éventail de technologies : mélangeurs à rubans, pales, socs de charrues, mélangeur en V, biconique, à augets, etc. Chaque application est étudiée pour proposer la solution optimale en intégrant les contraintes process, implantation, budget, etc. Des tests sont possibles sur les équipements disponibles dans la salle d'essai de la société.


Existe-t-il d’autres systèmes pour réduire les consommations énergétiques ?

A. D. : En effet, un premier pas est déjà de diminuer au maximum la consommation énergétique. Il existe des solutions permettant de réduire les consommations énergétiques sur des installations « classiques » ou même existantes. Nous pouvons les classer en deux catégories : optimisations du process et récupération d’énergie. Par optimisation du process, nous entendons de vérifier que la ligne de séchage est bien entretenue, réglée, optimisée. Un remplacement ou une réparation de l’isolation thermique peut parfois déjà avoir un impact sensible. Les plus vieilles installations sont aussi souvent plus bien optimisées pour les nouveaux process et/ou produit et, fréquemment, un sur-séchage est rencontré chez nos clients. Ces optimisations peuvent souvent déjà engendrer des économies de l’ordre de 5 à 8 %. Ensuite, sur de nouvelles installations mais aussi sur des installations existantes, il est possible d’installer des systèmes de récupération de chaleur. Sur une ligne de séchage en mode direct, les plus grosses pertes énergétiques sont « à la cheminée » car l’installation rejette dans l’atmosphère de l’air chaud et humide. Il est possible de récupérer une partie des calories rejetées à l’atmosphère pour les réutiliser dans l’installation de séchage. Pour ceci, deux possibilités se présentent : préchauffage de l’air de séchage grâce à des échangeurs de chaleurs entre l’air d’exhaure et l’air frais, et recirculation d’une partie de l’air de séchage. Le système de préchauffage consiste à utiliser les calories dans l’air d’exhaure de la ligne de séchage pour pré-chauffer l’air frais avant de l’alimenter dans la batterie de chauffe. Ceci peut théoriquement être fait via un échangeur type air/air entre les deux flux d’air mais cette solution est souvent difficile à implanter et onéreuse. La solution préconisée chez LESSINE se base sur l’utilisation de deux échangeurs de chaleur avec un circuit caloporteur. Un échangeur de chaleur est positionné en sortie gaz chaud après le filtre. Celui-ci chauffe un circuit d’eau chaude qui circule et repasse dans un autre échangeur de chaleur installé à l’aspiration de l’air ambiant qui va être utilisé pour le séchage. Ainsi, l’air extérieur (qui peut être à 5 à 10 °C en hiver) est préchauffé a des températures avoisinant les 60 à 80 °C, ce qui réduit la consommation de la batterie de chauffe du sécheur. Ce système permet généralement de réaliser des économies allant de 5 à 15 % selon l’application et l’installation. Son implantation et son fonctionnement restent simples et le retour sur investissement est rapide. De plus, il peut souvent être intégré dans des installations existantes.

Une autre alternative, appelée PGR (partial gaz recirculation), consiste à réutiliser partiellement les gaz chauds. Ce système est particulièrement adapté lorsque l’humidité relative de l’air d’exhaure est basse. Il permet ainsi de faire recirculer une partie des gaz chauds en entrée de process. Ces gaz de recirculation sont alors dilués avec l’air frais et en augmente donc la température avant injection dans la batterie de chauffe. Ceci réduit par conséquent les calories nécessaires au séchage. Cette solution permet d’atteindre des réductions pouvant aller jusqu’à plus de 30 % dans certaines applications. Toutefois, le PGR peut être plus complexe à mettre en place (contraintes d’implantation) et plus complexe dans ses réglages (balance aéraulique).

LESSINE propose des services d’expertises sur les installations existantes pour aider les industries à réduire leur consommation énergétique sur leur ligne de séchage. Ces expertises incluent l’étude des optimisations ainsi que la possibilité d’intégrer des solutions de récupération.


Une expertise multisectorielle

LESSINE est historiquement présent sur différents secteurs : l'industrie minérale, les matériaux de construction, les applications métallurgiques, la chimie, l'agroalimentaire et la pharmaceutique. La société a développé tout une gamme de solutions répondant aux besoins d'applications très variées, de l'industrie lourde à la chimie fine en passant par l'agroalimentaire ou encore la pharmaceutique. Elle est aussi reconnue pour son expertise dans les applications impliquant des poudres explosives (ATEX). Aujourd'hui, LESSINE est résolument tournée vers l'avenir et participe à de nombreux projets novateurs : valorisation de coquilles, production de protéines alternatives, valorisation de minéraux pour l'utilisation bas carbone en alternative aux ciments classiques, etc.