Comment Rousseau anticipe son avenir ?

Le 25/06/2025 à 10:55 par La rédaction

Le constructeur français de solutions de stockage en matériaux composites (silos, cuves, trémies, bacs) accorde une importance toute particulière aux enjeux environnementaux et mène de nombreuses actions pour la revalorisation ou le recyclage de ses déchets. Faisons le point avec Gaël Cheval, directeur général associé de Rousseau.

Pouvez-vous rappeler vos différents métiers ? À qui adressez-vous vos solutions de stockage ?

Gaël Cheval : Notre société, basée dans les Deux-Sèvres (79), conçoit, fabrique, transporte et installe depuis bientôt 60 ans des solutions de stockage à destination des industriels, mais aussi historiquement à destination des exploitants agricoles. Nous leur proposons des réservoirs réalisés en matériaux composites, le plus souvent en stratifié fibre de verre et résine polyester : des silos et des trémies pour le stockage du vrac solide (poudres, pulvérulents, granulés, etc.), des cuves et des bacs pour le stockage des produits liquides. Nous fabriquons également en interne tous les éléments métalliques équipant les réservoirs: châssis, passerelles, échelles, etc. Toute la fabrication est réalisée sur notre site et nous fournissons des solutions clé en main, prêtes à être mises au sol chez le client. Nous produisons et livrons environ 1000 cuves et silos tous les ans, toutes activités confondues. Nos solutions répondent aux besoins des industriels dans les métiers du traitement de l’eau, de l’agroalimentaire, de la viabilité hivernale, de la chimie, de la plasturgie, etc. Elles peuvent parfois aider les industriels à se mettre en conformité avec les dernières réglementations environnementales, je pense notamment à la loi AGEC pour la prévention de la dispersion des granulés plastiques dans l’environnement, le silo étant l’alternative idéal au stockage en big bags. Enfin, localisé sur un site secondaire, nous avons également une activité de fabrication de pièces en sous-traitance, majoritairement à destination du nautisme.

Silo de stockage de chaux sur jupe porteuse pour le traitement de l’eau.

Quelles sont les répercussions du contexte géopolitique actuel sur vos activités ?

G. C. : Les années 2020, 2021 et 2022 ont été très perturbées pour des raisons que nous connaissons tous. En 2025, notre objectif est de maintenir un niveau d’activité satisfaisant dans un contexte international incertain. Avec les nouvelles règles américaines d’importation et d’exportation, qui faisaient elles-mêmes suite à des mesures de rétorsion chinoises, nous subissons l’effondrement d’un marché sur lequel nous intervenons: celui du vinicole, et précisément celui du cognac. En effet, tous les ans, nous fournissons plusieurs centaines de cuves de vinification pour le stockage des vins destinés à l’élaboration des eaux de vies nécessaires à la production de cognac. Ce secteur est très gravement touché du fait des tensions commerciales et internationales. Nous gardons toutefois une bonne visibilité sur les autres marchés agricoles et industriels. Lorsqu’on souffre sur l’une de nos activités qui pèse environ 15 % du chiffre d’affaires de la société, cela nous pousse à être toujours plus conquérants sur les autres secteurs et à rechercher des marchés de renouvellement.

Que mettez-vous en place pour faire face à ces défis ?

G. C. : Malgré les soubresauts, nous avançons en diversifiant nos activités et en lançant de nouveaux produits. Nous mettons notamment nos efforts sur le développement de nouvelles gammes de silos de plus petites tailles destinés au stockage de compléments alimentaires, de 2 à 5 m3 , très prisés en élevage dans certaines productions animales. Nous lançons également une gamme totalement renouvelée de cuves à eau de petit format dédiées à la récupération des eaux de toiture, qui proposent les avantages du composite en comparaison aux solutions existantes en plastique. Le stockage d’eau va devenir dans les prochaines années un enjeu critique ! Nos positions restent fortes dans l’industrie et nous avons musclé notre organisation pour répondre aux demandes de plus en plus exigeantes de nos clients: recrutement de nouvelles compétences au sein de notre bureau d’études, efforts de rééquipement de nos ateliers de fabrication, professionnalisation de notre supply chain, etc. Nous avons libéré des capacités de fabrication pour maîtriser nos délais et proposer un meilleur support technique.

Ensemble de cuves conçues par Rousseau pour une usine agroalimentaire.

Pouvez-vous présenter les travaux menés pour la valorisation de vos déchets composites depuis 2023 ?

G. C. : Nous travaillons des matériaux composites, à base de fibres de verre et de résine polyester : cette dernière a été conçue pour qu’une fois travaillée, elle ne puisse pas revenir à son état d’origine. Autrement dit, les matériaux n’ont pas été conçus pour être recyclés. Néanmoins, ces dernières années, un écosystème de start-ups s’intéresse au sujet du traitement des déchets composites. Les gisements sont très importants, intégrant par exemple le nautisme et l’aéronautique. Notre travail de veille active consiste à rester parfaitement informés sur les nouvelles technologies de recyclage de ces matériaux, et à les tester. Depuis 2023, nous avons mis en place une revalorisation énergétique de nos déchets composites en combustible solide de récupération (CSR) à destination des cimenteries. Nos déchets sont transformés en combustibles qui viennent remplacer les carburants fossiles utilisés dans l’industrie du ciment. Cela fonctionne très bien depuis deux ans. Le collecteur, le préparateur des CSR et le client utilisateur se trouvent tous dans un rayon de 100 km, un bel exemple de ce qui peut se faire à l’échelle locale.

Rousseau conçoit des solutions adaptées à chaque besoin spécifique.

Vous avez réalisé des tests de retraitement des déchets composites : que vont-ils permettre ?

G. C. : Nous continuons de faire évoluer les matières premières que nous employons. Nous avons intégré dans notre fabrication depuis quelques années des topcoats à faible teneur en styrène pour réduire les émissions de COV dans l’atmosphère, mais aussi réduire la pénibilité des opérateurs. Très bientôt, nos gelcoats vont également passer en formulation à faible teneur en styrène, nous finissons nos travaux de qualification. Parallèlement, nous avons lancé des tests de recyclage de nos déchets de production avec la société suisse Composite Recycling. La fibre de verre issue de processus de retraitement proposée par cette société pourrait être récupérée pour être réintroduite dans des tissus hydrides mêlant fibres de verre vierges et fibres de verre recyclées, ou directement dans nos stratifiés pour des pièces qui ne nécessitent pas une grande résistance mécanique. Nous savons aujourd’hui que nos déchets sont éligibles à ces procédés et nous avons déjà réalisé des tests convaincants : nous espérons industrialiser cette réincorporation en 2026 lorsque l’unité de retraitement de Composite Recycling aura montée en cadence et nous le permettra, à la manière dont nous avons industrialisé l’incorporation de fibres végétales de lin en alternative à certaines fibres de verre dans une large gamme de nos produits destinés au monde agricole au cours de ces dernières années.

Le savoir-faire de Rousseau est reconnu depuis près de 60 ans.

Pourquoi est-ce important pour vous d’être certifiés MASE et Ecovadis ?

Site de Rousseau à Fenioux (79).

G. C. : La RSE est un axe de développement majeur pour Rousseau, au-delà de l’exigence réglementaire.
Il est important pour nous d’être certifiés pour crédibiliser notre discours et nos actions. Nous avons obtenu le renouvellement de la certification MASE en novembre 2024, qui valide les progrès continus menés par la société pour protéger au mieux la santé et la sécurité de nos collaborateurs, mais aussi celles de nos clients. Notre certification MASE est valable jusqu’en novembre 2027. Elle valide aussi notre maîtrise de notre empreinte environnementale : tri sélectif, gestion vertueuse des déchets, retraitement de nos déchets composites, etc. Nous avons également obtenu la certification EcoVadis Bronze en juillet 2024, qui valide au sens large la qualité de notre politique RSE. Ces certifications peuvent ouvrir des portes pour l’obtention de nouveaux marchés, car elles viennent attester du sérieux de notre politique RSE et des progrès menés sur l’hygiène, la santé, la sécurité et l’environnement. Rousseau va aussi mettre à disposition de ses clients un rapport annuel RSE, qui synthétise de manière claire et précise l’ensemble des actions RSE menées par la société.