Créée en septembre 2025, l’entreprise PowderCraft est le fruit de nombreuses années de recherche dans les milieux granulaires. Son objectif ? Aider les industriels à mieux connaître leur poudre afin de mieux la maîtriser. Rencontre avec les cofondateurs : Sébastien Kiesgen de Richter, expert scientifique et professeur de l’institut de recherche LEMTA, Adrien Gans, directeur technique et enseignant-chercheur du LEMTA, et Mélanie Gans, PDG.
Dans quel contexte la société Powdercraft a-t-elle été créée ?
Sébastien Kiesgen de Richter, Adrien Gans et Mélanie Gans : Le projet de création de l’entreprise a été lancé il y a plus d’un an, initialement par Sébastien et Adrien, tous les deux chercheurs en physique des poudres au LEMTA (Laboratoire Énergies & Mécanique Théorique et Appliquée). Il se trouve que la loi PACTE nous permettait de déposer une propriété intellectuelle pouvant donner lieu à la création d’une entreprise, et nous avions justement une innovation prometteuse. Cette innovation, qui a finalement peu d’intérêt en recherche fondamentale, permet de résoudre un certain nombre de problèmes dans le monde industriel du vrac. Nous nous sommes alors rapprochés d’un incubateur pour mettre sur pied l’entreprise et Mélanie, qui profite d’une expérience en tant qu’ingénieure industrielle, a rejoint l’aventure. La société PowderCraft a ainsi été créée le 24 septembre 2025 et est installée à Vandoeuvre-lès-Nancy (54), avec pour vocation d’apporter une réponse rapide aux industriels, sans passer par le parcours académique.
Pouvez-vous nous parler de votre méthode de calcul permettant de caractériser les poudres ?
S. K. R. et A. G. et M. G. : Nos prestations reposent sur des méthodes de mesure innovantes, développées par Adrien et Sébastien, qui permettent de caractériser les poudres et d’obtenir des données jusque-là inaccessibles. Nous pouvons notamment mesurer la cohésion des poudres, leur friction interne, leur hygrométrie ou encore leur granulométrie, et corréler tous ces paramètres aux process industriels. Pour réussir à concevoir notre outil et obtenir des valeurs absolues, nous avons pris le problème des poudres à l’envers : nous avons conçu des poudres dont nous connaissions déjà toutes les propriétés afin de calibrer un certain nombre d’appareils. Notre travail consiste à analyser les propriétés intrinsèques de la poudre, puis à accompagner l’industriel dans le choix de la solution technique à utiliser, en prenant en compte son environnement et son processus de fabrication.

En quoi est-elle différente des méthodes utilisées traditionnellement ?
S. K. R. et A. G. et M. G. : Généralement, les méthodes de calcul utilisées pour la caractérisation des poudres font appel à une mesure de référence, via notamment les indices de cohésion ou la classification. Chez PowderCraft, la mesure des propriétés est absolue : nous décrivons la poudre par ses propriétés intrinsèques et nous proposons la caractérisation des poudres en unités du système international. Cela nous permet d’intégrer les valeurs dans des modèles mathématiques aujourd’hui utilisés dans la recherche pour réaliser de la prédiction de comportement des poudres. Autrement dit, nous pouvons désormais calibrer des machines et des simulations numériques avec des mesures absolues plutôt qu’avec des corrélations d’indices.

La phase de simulation est-elle toujours nécessaire ?
S. K. R. et A. G. et M. G. : Le fait de caractériser les poudres en unités du système international nous permet de rapidement savoir ce qu’il est techniquement possible de faire ou non. Par le passé, Adrien et Sébastien ont pu être contactés par des industriels souhaitant réaliser une simulation numérique pour appréhender leur problématique, mais nous nous sommes vite rendu compte qu’avec les bons outils, la simulation n’était pas forcément nécessaire. Avec la connaissance et le savoir-faire, il est possible de sonder des modèles mathématiques et informatiques et de savoir s’il est plus intéressant de réaliser de la simulation, de la mesure, de l’expérience, etc. Nous pouvons donc efficacement prédire le comportement des poudres et anticiper un passage en production.
Pour quel type de problème votre méthode peut-elle s'utiliser ?
S. K. R. et A. G. et M. G. : Nous sommes en mesure de résoudre des problèmes dans la R&D, le stockage ou la production. Nous nous intéressons aux questions de mélange, d’écoulement, de changement de cohésion et de qualité. Tant que le problème concerne de la matière en vrac, nous en sommes en mesure de proposer notre expertise.
Votre méthode peut-elle s'appliquer à tous les secteurs industriels ?
S. K. R. et A. G. et M. G. : Nous évoluons dans le secteur de la recherche, qui est particulièrement vaste et pointu, si bien que nous ne nous cantonnons pas à un seul marché. Dès qu’un process doit traiter des poudres, nous pouvons aider l’industriel à résoudre ses problématiques, que ce soit dans le secteur agroalimentaire, pharmaceutique, du BTP, etc. Après analyse des caractéristiques d’une poudre, nous pouvons accompagner l’industriel sur les solutions techniques possibles à mettre en place. Aussi, nous pouvons dans certains cas transposer des innovations utilisées dans un autre secteur industriel, si les caractéristiques techniques et de puissance fonctionnent. Comme nous sommes issus de la recherche, nous avons cette envie de résoudre des problématiques qui n’ont pas encore de solutions et d’aider les industriels à optimiser leurs process.

Quelles sont vos motivations aujourd'hui ?
S. K. R. et A. G. et M. G. : Notre travail consiste à nous pencher sur des problèmes industriels complexes qui n’ont aujourd’hui pas de solutions : c’est le cœur de notre métier, et nous avons toute l’expérience requise pour cela. Nous réalisons une importante veille scientifique et nous sommes toujours à l’affût des innovations. Aussi, nous souhaitons, autant que possible, trouver des solutions à bas coût et qui ne nécessitent pas forcément de modifications importantes des process. Si une solution low-tech fonctionne, il n’y a aucune raison d’aller plus loin. Améliorer un process peut parfois passer par des solutions moins onéreuses que ce qui existe déjà et tout aussi fonctionnelles.

Que mettez-vous en place pour favoriser la transmission des connaissances ?
S. K. R. et A. G. et M. G. : En créant PowderCraft, nous nous sommes rendus compte d’un réel manque d’ingénieurs spécialisés dans les poudres. Notre objectif est d’assurer un transfert de connaissances et de compétences, et c’est dans ce cadre-là que nous souhaitons, à terme, embaucher une équipe d’ingénieurs et de docteurs. Nous souhaitons remettre les connaissances au cœur du métier, au cœur des industries.


