L’« économie montante » du granulés de bois

Le 06/04/2011 à 13:54 par La rédaction

Première interprofession des métiers du chauffage au granulé de bois, Propellet France est aux avant-postes avec le Syndicat des énergies renouvelables et le Syndicat national des producteurs de granulés de bois, pour promouvoir ce qu’il considère être une « économie montante ». Entretien avec Anne-Catherine Mangel, sa directrice.

Le Journal du vrac : Quelles sont les missions de Propellet et quelle est votre analyse du marché du granulé de bois ?

Anne-Catherine Mangel à propos de l'économie montante des granulés de bois

Anne-Catherine Mangel : Notre association rassemble des membres de la filière « pellet » - fabricants de granulés, distributeurs, constructeurs de matériels de chauffage et installateurs - autour de deux axes de travail. D’une part, la structuration d’une filière de qualité ; d’autre part, la promotion du chauffage au granulé de bois. Notre mission consiste également à faire en sorte que les prix du combustible soient stables et qu’il y ait une sécurité des approvisionnements. Nous travaillons à l’amélioration de la qualité du combustible, des matériels et des services. Nous menons des actions de formation. En novembre 2010, nous avons organisé des rencontres avec une cinquantaine d’élus des communes forestières de l’Ain, de l’Isère et de la Savoie. L’objet de ces réunions était de les sensibiliser à l’importance en termes d’énergie de la ressource en bois se trouvant sur leur territoire communal. Le marché du granulé de bois se développe. La production devrait atteindre 460 000 tonnes en 2010 et les prévisions indiquent que cette croissance va se poursuivre. La production pourrait être d’1 million de tonnes en 2020. Nous étions à 345 000 tonnes en 2009, 208 000 tonnes en 2008. Mais les fabricants de granulés de bois restent prudents. Le prix de vente du produit pour le chauffage domestique demeure bas. Le granulé de bois en vrac vendu par le fabricant dans 15 un rayon de 50 kilomètres sur la base d’une livraison de 5 tonnes est à 230 euros la tonne en moyenne. Le prix est fixé en fonction de l’offre et de la demande. Nous pensons qu’une majoration d’une dizaine d’euros la tonne sur le prix final serait facilement acceptée par le consommateur. Ce prix est très stable depuis plusieurs années comparé à celui des autres sources d’énergie.

JDV : Quand cette augmentation du prix pourrait-elle être envisagée et de quelle offre de matière première les fabricants de granulés de bois disposent-ils en amont ?

A.-C. M. : Il est difficile de dire à quelle date le granulé de bois devra augmenter. Le prix du bois-énergie payé par le consommateur devrait selon nous augmenter légèrement pour offrir une meilleure rémunération aux acteurs de la filière « bois » et contribuer à mobiliser la ressource en forêt. Si cette augmentation du prix a lieu, elle devra être progressive car le marché du bois-énergie est fragile et très sensible aux variations. C’est un marché qui n’aime pas les changements brutaux ! Il existe quantité de solutions en lien avec les pratiques sylvicoles pour accroître la disponibilité de bois. De nombreuses forêts se resserrent et s’assombrissent faute d’éclaircies régulières. Des secteurs sont en crise comme la papeterie, débouché non négligeable pour le bois des coupes d’éclaircie et les connexes de scierie ; ou comme celui de la fabrication de panneaux. Des scieurs ont arrêté leur production parce qu’ils ne trouvaient pas d’acheteurs pour leurs produits connexes dont les silos étaient pleins ! On s’aperçoit que grâce aux augmentations des prix de la sciure, la marge annuelle de certains scieurs égale les ventes de produits connexes. Le bois-énergie offre donc un débouché complémentaire et parfois vital aux forestiers et aux scieurs.

JDV : À l’avenir la sciure de bois pourrait ne pas rester la seule matière première disponible pour la fabrication des granulés de bois ?

A.-C. M. : Effectivement. Les fabricants de granulés de bois achètent la sciure auprès des scieries pour la presser dans des filières. Mais le virage pris par les granulateurs il y a trois ans en Allemagne, en Autriche et en Suisse est en passe de l’être en France. Les fabricants de granulés ont commencé en 2010 à s’équiper de matériels de broyage pour produire eux-mêmes de la sciure. Leur approvisionnement ne dépendra plus des seules scieries. Il va se diversifier en direction des opérateurs forestiers : bois d’éclaircie (rondins de petit diamètre, etc.), chablis, bois de tempête, bois scolytes - attaqués par les insectes - ; frange non valorisable en bois d’oeuvre (fabrication de meubles, construction, etc.) des coupes forestières. Les granulateurs n’iront plus seulement chercher de la sciure dans les scieries, ils vont s’intéresser à la plaquette de scierie tirée des chutes de bois après le sciage des grumes. Concernant le prix, les fabricants de granulés achètent le bois d’éclaircie environ 38 euros le m3 vendu. C’est un prix qui ne bouge pas beaucoup.

JDV : Dans ce contexte comment le marché des équipements de chauffage domestique va-t-il évoluer ?

A.-C. M. : Les ventes de poêles à bois sont en pleine croissance depuis 2005. Près de 250 000 poêles à bois ont été vendus en 2009 dont 25 000 poêles à granulés, contre 17 000 en 2008 et moins de 6 000 en 2005. Le poêle à granulés est assez bon marché. Il est conçu spécialement pour le combustible « granulé » ce qui lui permet d’être semi-automatique et d’atteindre des rendements de 90 %. Le prix pour un matériel de qualité se situe à partir de 3 000 euros. Certains matériels à 1 000 euros en grande surface sont à proscrire car peu performants en rendement - ils augmentent la facture de bois - et peu sûrs. Pour éviter ces risques l’essor à venir de ce marché doit être le fait d’installateurs qualifiés Qualibois, seule certification qui garantit un montage correct du poêle et son raccordement sécurisé au conduit de cheminée. En parallèle le marché de la chaudière, qui est l’équipement majoritaire (75 %), est stable. La bûche est pourtant moins pratique à utiliser. Malgré cela 20 000 chaudières à bois ont été vendues en France en 2009, 14 000 à bûche, 5 000 à granulés et 1 000 à plaquette de bois. En 2020, selon l’Ademe, il devrait se vendre 87 000 chaudières à bois pour une consommation de bois équivalente à celle d’aujourd’hui. Nous souhaitons que le granulé y prenne une bonne part. Toujours à l’horizon 2020 le marché total des équipements de chauffage domestique au bois devrait continuer de croître. Les ventes de granulés aussi. Il devrait se produire un glissement dans le choix du combustible de la bûche vers le granulé et la plaquette. En revanche, la consommation globale de bois-énergie devrait se stabiliser. Essentiellement parce que les matériels de chauffage seront plus performants, l’isolation et les paramètres énergétiques des habitations, supérieurs à ce qu’ils sont aujourd’hui.

Interview parue dans Le Journal du Vrac n°77, Janvier/février 2011


L’avenir radieux du bois-énergie

L’utilisation du bois, représentant plus de 90 % de la biomasse, est promise à un bel avenir. Elle est la première source d’énergie renouvelable en France. La loi Grenelle I, issue du Grenelle de l’environnement, a fixé des objectifs ambitieux en matière d’énergies alternatives. Si tout se passe comme prévu, la part des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie en France sera de 23 % en 2020, contre 13 % aujourd’hui. 40 % du développement escompté est à mettre au crédit du bois et de la biomasse. Les gains de productivité énergétiques devraient se trouver dans le chauffage collectif industriel et tertiaire. D’ores et déjà, le Fonds de chaleur, géré par l’Ademe avec pour mission de soutenir les projets d’énergies renouvelables, a été doté d’1 milliard d’euros sur trois ans (2009-2011). Le futur de la filière du bois-énergie paraît d’autant plus assuré qu’en amont la ressource est abondante. La forêt française - 17 millions d’hectares sur 28 % du territoire - est la troisième d’Europe et s’étend au rythme de 1 % par an. Voire, la récolte de bois reste inférieure de 40 % à ce que la forêt est en mesure de produire.